La journée : dimanche 29 juillet 2001
Réveil très matinal (6 heures) avant tout le monde, attiré par les bruits de la brousse… Observation des singes, lever de soleil sur la brousse puis footing jusqu’à Missirah. Retour au gîte, petit dej’ et départ en minibus pour Missirah : après une bonne averse, visite du village puis excursion en pirogue sur l’un des bras du delta du Siné Saloum jusqu’à l’île de la femme-marabout. Retour par les bolongs (bras d’eaux du delta), au milieu des palétuviers qui forment la mangrove. Avant de rentrer au gîte, photo souvenir du groupe sous le baobab ! En début de soirée, tour de savane avec Loïc. Repas et nuit au gîte de Bandiala.
Un chiffre
6 – L’heure très matinale à laquelle j’ouvre soudain les yeux : je me sens parfaitement réveillé et je n’ai aucune envie de me rendormir ! Je sors donc de la chambre pour constater que le soleil n’a pas encore pointé son nez… Je dors assez peu depuis le début du séjour, et je me lève chaque matin de bonne heure avec la ferme intention de profiter au maximum de chacune des journées sénégalaises qui s’offrent à moi. Mais je bats des records ce matin-là, et je dois patienter près de deux heures avant de voir mes compagnons émerger !
A voir / à faire
Le gîte et la brousse de Bandiala – Changement de décor : bien loin des zones désertiques de la Broussarde, nous entrons dans la verdure du Siné Saloum. La végétation est luxuriante, d’autant plus que dans cette partie du sud sénégalais, la saison des pluies a commencé. Cela ressemble vraiment à la brousse africaine avec ses forêts, ses grandes prairies au milieu desquelles trônent baobabs et fromagers… Situé à quatre kilomètres de Missirah, le gîte de Bandiala est en plein coeur de la forêt. Ses bâtiments sont les seules constructions du coin, et mis à part les singes, nous ne devrions pas être embêtés par les voisins !
La faune de Bandiala – Les deux singes entraperçus la veille n’étaient pas échappés d’un cirque : Bandiala est une réserve naturelle dans laquelle il n’est pas rare d’observer singes, phacochères, gazelles, calaos, tisserands et autres oiseaux en tous genres. Mais qu’il est difficile de réaliser un safari-photo ! Les singes s’enfuient à toute vitesse dès qu’ils nous voient arriver, les oiseaux s’envolent à chaque fois trop tôt… Quant aux phacochères, on n’en a pas vu la queue d’un ! Restent les trois espèces de gazelles : celles à quatre pattes (qui se font rares), celles à deux pattes (les filles !), ou celles sans patte (la bière locale). Cette dernière est sans hésitation la plus facile à approcher…
Le fromager millénaire de Missirah – Il paraissait déjà immense de loin, mais en approchant il devient carrément impressionnant. Avec le baobab, le fromager (qui ne produit pas de fromages) est l’autre arbre géant du Sénégal ; ses branches sont plus imposantes, larges et sinueuses, très caractéristiques.
Celui de Missirah est le symbole du village, arbre sacré et lieu de prédilection pour toutes les palabres. Je n’ai retenu ni la taille ni la circonférence de cet extraordinaire spécimen, mais sur une photo Nanie et Pascal paraissent minuscules au pied du tronc ! Il y a des jours où l’on se sent bien petit face à la nature…
Les bolongs du Siné Saloum – Nous naviguons en pirogue à travers les paysages classiques de cette région : les bolongs. Ce sont ces innombrables bras d’eaux qui découpent le delta au milieu de la mangrove. Certains sont larges de plusieurs centaines de mètres, d’autres de quelques mètres seulement…
Les passages les plus étroits m’évoquent des images du marais poitevin (mais je ne suis pas vraiment sûr qu’on y trouve des palétuviers). C’est très agréable de se déplacer en pirogue dans ce cadre, mais le retour n’en finit plus. Je comprends alors grâce à Loïc l’origine du nom de ces bras d’eaux : “C’est pour ça qu’on appelle ça les bolongs, c’est beau et c’est long…”
Souvenirs-sourires…
Le cirque matinal des singes – Attiré par les bruits de la brousse, réveillé par les cris des oiseaux et des singes, je sors de la chambre pour découvrir un spectacle fabuleux. Le soleil n’est pas levé mais la nature est pleine de vie : des branches bougent de tous les côtés… Il y a des singes de partout, dans chaque arbre, juste à côté du gîte ! Je tente de prendre quelques photos mais il fait encore sombre et les macaques ne sont pas très dociles…
Je les observe ainsi pendant une bonne heure, volant de branche en branche, s’arrêtant parfois pour pousser un cri qui ressemble à un rire. Je reste en extase devant le show de ces artistes, je m’éclate à n’en plus finir devant leurs acrobaties et leurs folies aériennes. Puis ils quittent la scène les uns après les autres au fur et à mesure que le soleil se lève. Lorsque je reviens de Missirah moins d’une heure plus tard, seuls les oiseaux chantent encore : le cirque est terminé et la brousse a retrouvé son calme…
Le baobab des toubabs – Je sais, c’est pas bien, mais j’ai fait un caprice et j’ai embêté tout le monde pour faire une photo collective. Vu que le groupe n’était pas très discipliné, j’ai dû être un peu désagréable et recourir à toute mon autorité naturelle d’instit’ pour les faire poser comme je voulais sous un baobab… J’ai une excuse : je voulais cette photo pour illustrer la couverture du carnet de voyage. Alors dites-moi, elle est pas belle ? Osez me dire que ça ne valait pas le coup de faire tout ça…
Sur les traces des gazelles – Avant le repas du soir, Loïc propose d’aller faire une petite balade autour du gîte pour traquer les gazelles, je suis le seul à l’accompagner. Les grandes étendues de savane permettent de voir loin à l’horizon, mais nous ne distinguons pas le moindre petit bout de corne au milieu des hautes herbes ; les singes ne sont pas plus nombreux en ce début de soirée. Nous suivons bien quelques empreintes de sabots sur un chemin, mais la piste ne nous mène nulle part. Et puis soudain, l’une d’elles nous apparaît : c’est une gazelle à deux pattes, un appareil photo à la main… C’est Virginie qui traque les singes elle aussi. Nous nous baissons pour ne pas qu’elle nous voit, et Loïc jette un premier caillou dans un buisson à quelques mètres d’elle. Puis un second quelques secondes plus tard, un troisième… L’effet est immédiat : Nyny s’éloigne visiblement effrayée. Elle finit par nous apercevoir, tous les deux écroulés de rire : “C’était vous ? C’est pas drôle, j’ai eu peur, j’ai cru qu’un singe me lançait des cailloux…”
Une ambiance
Plaisirs égoïstes dans la brousse matinale – En extase devant le spectacle des singes et toute la vie de la brousse à l’aurore, j’ai presque envie de réveiller tout le monde pour partager ce moment exceptionnel. Pas certain de déclencher un enthousiasme général pour des singeries à six heures du matin, je me ravise ; je reste seul et je souris, je savoure l’instant, heureux d’assister à ce show simiesque improvisé spécialement pour moi ! Le jour progressant, je m’éloigne du gîte en prenant le chemin de Missirah pour assister au lever de soleil sur la brousse humide de rosée, teintant le ciel de couleurs magnifiques.
Je rentre au gîte pour chausser mes baskets, et je démarre mon premier footing sénégalais en direction de Missirah. J’emprunte le chemin d’accès normal au gîte, par lequel nous aurions dû arriver la veille… Il fait beau, il fait bon, et je découvre avec enthousiasme ces nouveaux paysages du Siné Saloum.
Après quelques kilomètres, je parviens à Missirah et je traverse le village qui s’éveille sous les yeux quelque peu étonnés des habitants ; quelques enfants me saluent en souriant… Je rejoins le quai des bateaux de pêche sur les bords du fleuve, et je poursuis ma course jusqu’au bout de la jetée, où quelques pêcheurs apprêtent leurs pirogue. Je m’arrête pour contempler les reflets du soleil sur ce bras de delta, et je regrette de ne pas avoir mon appareil avec moi. Enfin, je rentre tranquillement en courant jusqu’au gîte, comblé par ces moments d’évasion solitaire. Si j’adore partager mes émotions au cours d’un voyage, j’aime aussi tous ces instants de plaisir égoïste…
Bouilles de mômes
Bain de foule à Missirah – Avant d’embarquer en pirogue pour les bolongs, un guide local nous fait découvrir Missirah. La visite commence autour de l’énorme fromager, un peu à l’écart du village. Là, un petit groupe d’enfants a déjà commencé à nous emboîter le pas. Ils se mêlent rapidement à nous, certains plus audacieux viennent même nous donner la main pour continuer la visite…
Je profite du fait qu’ils ne soient pas très nombreux pour distribuer discrètement quelques stylos ; l’un des gamins qui donne la main à Nanie reste d’ailleurs en extase devant ce présent qu’il contemple sans arrêt avec un immense sourire ! Nous poursuivons en retraversant l’avenue principale, et des mômes sortent petit à petit de tous les côtés pour nous accompagner : un véritable bain de foule, dont la moyenne d’âge ne doit pas dépasser les dix ans. Sans rien réclamer sinon un peu d’attention, ils nous suivent pas à pas : dès qu’une main de toubab se libère, deux ou trois petites mains noires se précipitent pour la saisir ! Cette affection spontanée et désintéressée est très touchante, et les sourires timides de ces petits anges sont adorables. Je ne me lasse pas de la générosité de cette Afrique-là, et je me promets déjà de revenir…
Et au menu :
Huîtres de palétuviers grillées – La pirogue s’est approchée des palétuviers et notre guide a cassé une branche pour nous montrer les élevages naturels de la mangrove. Comme moi, tout le monde se montre très intéressé par les huîtres, mais personne n’est assez téméraire pour goûter celle que Loïc vient d’ouvrir… Pourtant, ça se bouscule le soir à l’hôtel autour du barbecue pour déguster les huîtres grillées ! Jetées au feu comme les moules d’une éclade, elles ont perdu toute leur viscosité et c’est un vrai délice, même pour moi qui d’ordinaire n’aime pas ça…
« De Thiès à Missirah via Kaolack