Dakar, vendredi 3 août 2001
Pour être honnête, ces retrouvailles du dernier jour avec la capitale ne m’enchantent guère. D’abord, parce qu’après avoir parcouru un pays tout en sourires et en sérénité, je n’ai aucune envie de me replonger dans le climat malsain des rues dakaroises ; ensuite, parce qu’elles signifient surtout l’imminence de la fin du voyage…
Après un ultime repas en arrivant en ville (poisson et riz au menu…), nous rejoignons la maison Vieira pour poser les sacs. Nous devons effectuer les derniers mètres à pied car l’avenue Pompidou est complètement bloquée : il est 14h15, c’est l’heure de la grande prière collective. Les automobilistes descendent de leurs véhicules et s’agenouillent avec les piétons : un silence impressionnant envahit les rues ! En début d’après midi, nous effectuons quelques achats sans aucun souci à Sendaga, bien encadrés par Amath et quelques « parrains » locaux… je ne suis malgré tout pas très à l’aise. Sihar est là aussi, il a encore l’audace de me demander un peu d’argent… Je l’abandonne avec mépris : « Ce n’est pas important l’argent Sihar ! L’important c’est l’art et les gens… »
En début de soirée, nous prenons la route de l’aéroport ; il y a quelques bouchons et quelques commerçants ambulants se pressent encore aux fenêtres. Pascal nous en débarrasse pour de bon : rendu malade par la cachet de Savarine avalé le ventre vide, il ouvre grand la fenêtre et dit au revoir à Dakar d’une manière très personnelle, en éloignant deux vendeurs de breloques qui s’approchaient de notre véhicule !
Après une heure trente d’embouteillages, nous parvenons à l’aéroport. Amath a tenu à nous accompagner jusqu’au bout avant de rentrer chez lui ; nous le retrouvons dans le hall après l’enregistrement, il a des cadeaux pour tout le monde : gris-gris pour les filles et porte-monnaie pour les garçons. Quel garçon phénoménal, quelle gentillesse ! L’émotion est trop forte, il laisse échapper quelques larmes en nous serrant dans les bras les uns après les autres au moment des au revoir. C’est tellement touchant…
Cette fin de ce voyage me rend déjà nostalgique. Ce n’est pas tellement le retour au pays et à ma petite vie qui me dérange, c’est autre chose, comme un sentiment de partir d’ici sans laisser de traces… J’ai tellement reçu pendant ces quinze jours, les sénégalais m’ont tellement donné d’eux mêmes, j’ai tant appris de leurs sourires, de leur générosité, de leur sagesse face à la vie ! Moi là-bas j’ai passé mon temps à prendre : j’ai pris des photos et des notes, j’ai reçu des leçons de vie mémorables, j’ai ramené des babioles, j’ai emmagasiné des tas de souvenirs… et puis ?
J’ai adoré ce premier contact avec le continent africain, et ces deux semaines sénégalaises m’ont emballé de bout en bout. Mais j’ai le sentiment d’avoir encore tout à vivre dans ce pays, dans cette partie du monde si différente – et si riche de sa différence. Je rêve d’une autre découverte de l’Afrique, d’un autre voyage, d’un autre regard… de n’être plus simple visiteur.
J’ai très envie de revenir ici, autrement. Et je reviendrai…
Cyril le toubab – été 2001