Avec Lolo et Fifi (et Titine, évidemment), nous avions décidé d’aller passer une nuit en brousse à la belle étoile, à quelques kilomètres de N’Dangane. Nous avons pris la piste habituelle, à la recherche du plus beau baobab du secteur, pour réaliser mon rêve : grimper et me poser quelques instants dans les branches du seigneur de la brousse.
Ambiance : un paysage de brousse africaine vers 18 heures. Titine garée au pied d’un baobab, séance photo au meilleur moment de la journée : le soleil décline, embrasant tout de ses chaudes couleurs. Coucher de soleil entre les baobabs et les roniers. Le silence n’est troublé que par le vent dans les buissons et quelques chants d’oiseaux. Soleil couché, festival de couleurs dans le ciel du crépuscule. La couverture de Marcel est déroulée, parce que le sol est assez dur, sec et piquant. Pique-nique : une bonne Gazelle bien fraiche, un petit paquet de Biskrem, une banane, et puis le thé (c’est moi qui m’y colle, je sais presque faire). La nuit tombe, les premières étoiles apparaissent. Couchés par terre, les trois brads guettent les étoiles filantes. La musique d’Ismaël Lo et le dernier Live de Noah accompagnent doucement la nuit. Pendant que mes acolytes profitent sans rien trouver à dire d’autre que « c’est énorme » ou « on a bien fait d’acheter ici », je danse au milieu de la brousse. Bientôt la lune apparaît, pour clore une chorégraphie parfaite : coucher de soleil, plafond d’étoiles, lever de lune sur les roniers. Amoul dara fi ?! (Y’a rien là ?!)… Merci les brads.
C’est au matin que ça s’est gâté. Lorsqu’il a fallu lever le camp et constater que nos fringues et le dessous de la couverture étaient constellées de cram-cram… Le cram-cram ? C’est une plante graminée typiquement sahélienne (khakham en wolof, Cenchrus biflorus de son nom scientifique), dont les petites graines garnies de petits piquants ont la fâcheuse tendance à s’accrocher à tout vêtement et à se planter dans la peau – surtout lorsqu’on cherche à a retirer avec les doigts ! Lolo a passé la journée avec sa pince à épiler…
Bref, c’est un de ces petits plaisirs incontournables de la brousse, que tous les grands voyageurs et explorateurs ont eu la joie de rencontrer… J’avoue avoir jubilé intérieurement à la lecture des ces passages !
Au-delà du ruisseau, mes guides changèrent de direction; nous fîmes cinq milles à l’E., sur un terrain couvert de khakhames, qui m’incommodèrent beaucoup. (René Caillé, Journal d’un voyage à Temboctou et à Jenné dans l’Afrique centrale)
Les clairières éteint couvertes d’un épais tapis de graminées semant à tous vents leurs graines hérissées de minuscules piquants. Ceux-ci s’accrochent partout aux vêtements du marcheur mais surtout à ses pieds nus dans les sandales ; très fines, les aiguilles du cram-cram pénètrent sous la peau à la façons des piquants d’oursin et rendent la marche extrêmement douloureuse. (Roger Frison-Roche, L’esclave de Dieu)
Je me reverrai toujours, au retour de ce pieux pélerinage, sautillant pieds nus dans des touffes de cram-cram, généreusement chargées d’épillets mûrs à point aux mille aiguillons barbelés, les poches gonflées d’excréments secs et crayeux de crocodiles en guise de pièces à conviction. (Théodore Monod, Méharées)