Pour avoir déjà participé à une conférence pédagogique au Burkina, j’avais déjà pu constater à quel point il peut être difficile d’organiser un rassemblement d’enseignants éparpillés dans des écoles de brousse parfois situées à plus de 80 km du lieu de réunion.
Pour pouvoir assister à la réunion des directeurs prévue à 10h à Fatick (60 km de N’Dangane), je me suis levé à 6h30. J’ai rejoint Fimela en voiture, où j’ai retrouvé M. M’Bodj venu à pied de Yayem et M. Basse venu de N’Dangane en mobylette. 7h : départ du taxi-brousse (N’Diaga N’Diaye 35 places) pour Diosmone (correspondance), arrivée à Fatick vers 9h30.
A 10h la réunion commence en présence d’une centaine de directeurs, je suis évidemment le seul toubab. C’est l’inspecteur départemental M. Daff qui ouvre la réunion, encadré par ses adjoints.
Très vite, c’est plutôt ennuyeux. Comme il est trop coûteux et trop compliqué de diffuser en brousse les photocopies des circulaires, celles-ci sont lues intégralement et les directeurs doivent évidemment prendre des notes pour n’oublier aucune information capitale à rapporter à leurs collègues. L’info du jour concerne le recrutement des futurs élèves de CI (Cours d’Initiation, qui précède le CP) pour la rentrée à venir : l’inspecteur exhorte les directeurs à dépêcher dans les villages des équipes mobiles pour mener une campagne de recrutement porte-à-porte auprès des familles, afin d’inscrire à l’école tous les élèves de 6, 7 et 8 ans non-scolarisés…
Nous sommes en train de faire des efforts pour construire des classes, si nous n’avons pas d’élèves à mettre dedans, cela n’a aucun sens !” (M. Daff, inspecteur départemental)
Et puis, l’adjoint chargé des examens et concours a pris la parole qui n’aurait jamais dû lui être donnée ! Pendant trente minutes, il a lu la liste complète des enseignants convoqués pour assurer la surveillance et la correction des épreuves à l’entrée en sixième… Il aurait été trop simple d’afficher la liste des noms ?
Une bonne partie de l’auditoire décroche, certains enseignants s’affalent littéralement sur leur table, un autre en profite pour mettre son téléphone en charge…
L’inspecteur reprend enfin la parole pour répondre à quelques questions d’ordre pédagogique en reproduisant quelques grandes éléments du verbiage institutionnel : “Il ne peut y avoir d’enseignement de qualité sans une vraie maitrise de la didactique des disciplines !” et autre “Un outil pédagogique doit être utilisé à bon escient en fonction de l’objectif que l’on poursuit…”
A midi, quelques enseignants commencent à quitter la salle et M. Daff réclame le silence : “La réunion n’est pas terminée !”. C’est l’heure des questions diverses : un directeur réclame que des sanctions soient prises à l’intention des collègues qui sèchent ou boycottent les cellules d’animation pédagogique…
12h30, l’inspecteur conclut : “Nous avons travaillé vite et bien, la prochaine réunion avec l’aide de Dieu aura lieu le 9 juillet…” Ce sera sans moi ! Après un passage par les locaux de l’IDEN, je reprends la route avec les directeurs venus de N’Dangane, Samba Dia, Djilor ou Yayem.
Au Sénégal, il faut compter au moins 5 heures de trajet aller-retour pour assister à une réunion qui dure 2h30… il faut donc prévoir la journée. Motivés, les directeurs !