Condoléances pour Kaikouta

De passage à Bignona, un message de l’ami Thom et une mission inattendue et très particulière…
Salut Cyril,
J’espère que tu auras ce message avant de partir de Bignona. Je voudrais que tu ailles saluer une famille pour moi. Il y a deux ans je suis allé à Bignona (destination finale de notre descente en voiture). Nous avons amené la voiture à un garçon nommé Kaiks (“cakes”)… Il s’est tué avec la voiture l’année dernière.

Je voudrais que tu salues sa famille de ma part. Ils nous avaient accueilli plusieurs jours. Demande à Ousmane, elle doit être au courant de la mort de Kaiks, sa mère est vendeuse de poisson à  Kafountine (village au bord de l’océan à voir si tu as le temps). J’espère que tu trouveras la famille, dis-leur que je pense à eux souvent et que je n’oublierai pas mon passage parmi eux.
Rends moi ce service, please.

Profite de ton trip, copain
Thom

—-

Salut Thom, sama waaye,
j’ai un peu de temps ce soir pour te dire que j’ai rempli la délicate mission que tu m’avais confiée… Il n’a pas été très difficile d’identifier la famille de Kaikouta Sidibé (“Kaiks”), Bignona est une petite ville où tout le monde se connaît et se rappelle le drame. Ousmane et son jeune frère m’ont accompagné, nous avons été reçu dans la grande pièce à l’entrée de la maison, il y avait au moins quinze personnes de 7 mois à 77 ans autour de la maman dans son fauteuil, scotchées devant un super épisode de telenovela brésilienne aux dialogues profonds, diffusé par la RTS, volume évidemment très fort.

J’ai transmis à Ousmane ton message qui a traduit à la maman, pas en wolof ni en poular mais… en mandingue. Très calme, la maman a dit que de toutes façons c’était la volonté de Dieu, mais que si elle avait pu parler à Dieu, elle lui aurait demandé de la prendre elle et non son jeune fils. Elle se souvient très bien de ton passage, de tes jeux avec les enfants et des échanges qui tu avais pu avoir avec elle. Et elle a ajouté que tu seras toujours le bienvenu dans la maison.

Tout cela a duré cinq ou dix minutes… sans même prendre la peine de baisser le son de la télé.

A ce moment-là, Ousmane m’a dit que c’était suffisant et qu’on pouvait aller. En ajoutant, “Si tu veux laisser quelque chose tu peux aussi.” Alors je lui ai glissé un billet de 5.000 qu’elle a remis à la maman en la saluant. Elle m’a soufflé l’expression mandingue qui convenait pour prendre congé (j’ai oublié) et nous sommes sortis seuls. Dans la tradition africaine, on ne raccompagne pas les gens qui vous visitent pour une mauvaise nouvelle…

Voilà, Kaikouta repose en paix à Bignona, que la terre de Casamance lui soit légère…

Bien des choses à toi mon ami,
Diam ak diam

Cyril Diallo, sénégaulois de Bignona